Histoire du Blues
Blues
Origines stylistiques | Musique africaine, chant de travail, negro spiritual |
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Origines culturelles | Courant xixe siècle ; Sud des États-Unis |
Instruments typiques | Guitare, batterie, chant,contrebasse, guitare basse,harmonica, piano, saxophone,trombone, trompette |
Scènes régionales | Monde entier, principalement aux États-Unis |
Sous-genres
Blues traditionnel, Kansas City blues, delta blues,Chicago blues, Texas blues, New York blues,british blues boom, blues rock, blues français,blues touareg, memphis blues, West coast blues
Genres associés
Le blues est un genre musical vocal, instrumental dérivé des chants de travail des populations afro-américainesapparues au Mexique et aux États-Unis au courant du xixe siècle ainsi que des immigrés anglais, irlandais, écossais, espagnols, français, polonais et d’indiens Cherokee, gens de pauvres conditions qui exprimaient eux aussi leurs peines dans un genre de musique comparable. C’est un genre où le chanteur exprime sa tristesse et ses déboires (d’où l’expression « avoir le blues »). Le blues a eu une influence majeure sur la musique populaire américaine, puisqu’il est à la source du jazz, du R’n’B et du rock ‘n’ roll entre autres.
Étymologie
Le terme blues vient de l’abréviation de l’expression anglaise blue devils (« diables bleus »), qui signifie « idées noires ». Le terme blue d’où le blues est aussi dérivé de l’ancien français et signifie « l’histoire personnelle » (il reste dans la langue française actuelle le terme bluette, qui est, pour tous les bluesmen, la signification du blues, une chanson à la première personne du singulier). La note bleue – en fait la gamme pentatonique mineure couramment utilisée dans la musique asiatique, à laquelle on ajoute une note dissonante – donne une sonorité particulière caractéristique du blues. L’utilisation de cette « blue note » est l’essence musicale du blues qui a de nombreuses origines (africaines, asiatiques via les Amérindiens, irlandaises, etc.)
L’utilisation de l’expression dans la musique noire américaine remonte au début du xxe siècle dans le Music Hall Américain (vaudeville) et était couramment employée dès le xixe siècle dans les pièces de théâtre traitant des Noirs du Sud des États-Unis (cf dans Americana, chez Fayard). W.C. Handy l’a en quelque sorte officialisée dans son Memphis Blues en 1905.
Histoire
Les plus anciennes formes de blues proviennent du Sud des États-Unis, à la fin du xixe siècle et au début du xxe siècle. Ces formes étaient le plus souvent orales, accompagnées parfois par un rythme donné par des instruments rudimentaires. C’est principalement dans les champs de coton de la région du delta du Mississippi(entre Senatobia et Clarksdale) que ces formes prennent des tours plus complexes. L’une des formes antérieures au blues est le Fife and Drums joué dans la région Hill Country du Mississippi (il s’agit d’un ensemble de percussions guidé par un fifre en bambou, instrument que jouait le maître en la matière, Othar Turner).
Il y eut d’autres formes de blues avec des instruments rudimentaires, le diddley bow, une corde fixée sur une planche, le jug, cruchon en terre dans lequel on soufflait. Puis le blues a évolué avec des instruments simples, tels que la guitare acoustique, le piano et l’harmonica. La légende raconte que l’un des guitaristes bluesmen,Robert Johnson, aurait signé un pacte avec le diable ce qui lui aurait permis de devenir un virtuose du blues (blue devils : c’est une musique liée aux forces maléfiques qui était fuie et rejetée par beaucoup de personnes aux États-Unis). Cependant, Robert Johnson ne serait pas le premier à avoir raconté cette histoire, c’est un autre bluesman, auteur du morceau Canned heat Tommy Johnson, qui en serait à l’origine.
W. C. Handy fut l’un des premiers musiciens à reprendre des airs de blues, à les arranger et les faire interpréter par des chanteurs avec orchestres. Il fut également l’auteur de morceaux parmi les plus célèbres, tel le fameux Saint Louis Blues. Du point de vue des textes, les premiers blues consistaient souvent à répéter un même vers quatre fois. Au début du xxe siècle, la structure s’est standardisée sous sa forme la plus commune : « AAB ». Dans cette structure, un vers est chanté sur les quatre premières mesures (« A »), puis répété sur les quatre suivantes (« A »), enfin, un second vers est chanté sur les quatre dernières mesures (« B »), comme dans l’exemple suivant : « Woke up this morning with the Blues down in my soul / Woke up this morning with the Blues down in my soul / My baby gone and left me, got a heart as black as coal ».
Les années 1920 et 1930 virent l’apparition de l’industrie du disque, et donc l’accroissement de la popularité de chanteurs et guitaristes tels que Blind Lemon Jeffersonet Blind Blake qui enregistrèrent chez Paramount Records, ou Lonnie Johnson chez Okeh Records. Ces enregistrements furent connus sous le terme de race records(musique raciale), car ils étaient destinés exclusivement au public afro-américain. Mais les années 1920 connurent également des chanteuses de classic blues extrêmement populaires, telles que Gertrude « Ma » Rainey, Bessie Smith, Ida Cox et Victoria Spivey.
Blues urbain d’après guerre
Après la Seconde Guerre mondiale, l’urbanisation croissante et l’utilisation des amplificateurs pour la guitare et l’harmonica menèrent à un blues plus électrique (tel que le Chicago blues), avec des artistes comme Howlin’ Wolf et Muddy Waters qui influencère le célèbre Jack Mawell quand il écrivit Black days. C’est ce blues électrique qui influencera, plus tard, une partie durock ‘n’ roll.
Vers la fin des années 1940 et pendant les années 1950, les Noirs américains ont migré vers les villes industrialisées du Nord comme Chicago et Détroit, pour y trouver du travail. Dans les villes comme Chicago, Détroit et Kansas City, un nouveau style de blues « électrique » apparut. Il utilisait la voix, la guitare électrique, la basse électrique, la batterie et l’harmonica amplifié avec un micro et un ampli. J. T. Brown, qui jouait avec les groupes d’Elmore James et J.B. Lenoir a également utilisé le saxophone, plutôt comme instrument d’accompagnement qu’instrument soliste.
Le style de blues urbain de Chicago fut bien influencé par le blues du Mississippi, d’où sont venus des musiciens comme Howlin’ Wolf, Muddy Waters, Willie Dixon, et Jimmy Reed. Les harmonicistes comme Little Walter et Sonny Boy Williamson (Rice Miller) étaient bien connus dans les clubs de blues à Chicago. Les autres joueurs d’harmonica, comme Big Walter Horton,Snooky Pryor et Sonny Boy Williamson, avaient aussi beaucoup d’influence. Muddy Waters, Elmore James et Homesick Jamesjouaient de la guitare électrique avec un « slide » ou « bottle neck » ; l’exercice consiste à jouer les notes sur le manche en posant un bout de métal ou un goulot de bouteille sur les cordes. B. B. King et Freddie King n’ont pas utilisé le « slide ». Les chanteurs Howlin’ Wolf et Muddy Waters marquèrent le blues de leurs voix rauques et fortes.
Le contrebassiste, compositeur, chercheur de talents Willie Dixon a eu un grand impact sur l’environnement musical de Chicago. Des chansons comme Hoochie Coochie Man, I Just Want to Make Love to You (écrite pour Muddy Waters), Wang Dang Doodle (pour Koko Taylor), et Back Door Man (pour Howlin’ Wolf) sont devenus des « standards » de blues. Nombres d’artistes de Chicago Blues enregistrèrent leurs disques sur le label Chess Recordsou d’autres labels importants tels Vee Jay et Cobra.
Le style de blues urbain des années 1950 a eu un grand impact sur la musique populaire des musiciens comme Bo Diddley et Chuck Berry. Aussi, le style de blues urbain des années 1950 a influencé le style de musique de Louisiane de zydeco, surtout Clifton Chenier. Les musiciens comme T-Bone Walker (de Dallas) étaient plus associés au style de blues de la Californie, plus policé et sophistiqué que le style de blues de Chicago, les Charles Brown’s Three Blazers étant le combo qui illustrera le mieux cette tendance au milieu des années 1940.
Les blues de John Lee Hooker étaient plus individuels que le style de blues de Chicago. À la fin des années 1950, le swamp blues s’est développé près de Bâton-Rouge avec des artistes comme Slim Harpo, Lazy Lester, Sam Myers et Jerry McCain. Le swamp blues était plus lent, avec un style d’harmonica moins complexe que dans le Chicago Blues. Les chansons du style les plus connues sont Scratch my Back, She’s Tough et King Bee.
Le jump blues était un autre développement du blues de cette période qui a influencé la musique populaire. Le jump blues était un hybride populaire du swing et du blues, mettant en vedette des chansons « up-tempo » orchestrées pour des big bands. Le musicien de ce genre qui a le plus influencé la musique populaire était Big Joe Turner, qui a enregistré la version originale de « Shake, Rattle, and Roll ». Pensons aussi à Tiny Grimes, Ruth Brown, et LaVern Baker (« Tweedle Dee »).
Années 1960 et 1970
Lors des années 1960, les genres de musique influencés ou créés par les noirs américains, comme le rhythm and blues et lamusique soul sont devenus populaires. Les musiciens blancs ont popularisé beaucoup de styles des américains noirs auxÉtats-Unis et au Royaume-Uni. Le Rock’n’roll a souvent été qualifié de mélange des musiques Noires et Blanches bien que ce mélange remonte aux années 1930 avec certains genres de la Country Music comme le Western Swing ou le Country boogie dont le Rock’n’roll n’apparaît souvent que comme un prolongement.
Dans les années 1960, une nouvelle génération d’enthousiastes du blues apparaît en Europe et en particulier en Angleterre. Les principaux acteurs de ce que l’on appelle alors le British blues boom sont les Yardbirds, les Bluesbreakers menés par John Mayall ou encore les Animals, Fleetwood Mac (1re période avec Peter Green), Chicken Shack, et incluent de nombreuses stars de la pop et du rock à venir Jimmy Page, Eric Clapton ou Jeff Beck (tous trois membres successivement des Yardbirds) qui intègrent à leur musique des influences psychédéliques et pop. À la fin des années 1960, le style West Side Blues fut créé à Chicago par des artistes comme Magic Sam, Magic Slim, Junior Wells, Earl Hooker et Otis Rush. Le West Side Blues de Magic Sam, Otis Rush, Buddy Guy et Luther Allison était caractérisé par une guitare électrique suramplifiée. Aux États-Unis, les guitaristes et chanteurs B. B. King, John Lee Hooker, et Muddy Waters ont inspiré une nouvelle génération de musiciens, comme le New-Yorkais Taj Mahal. L’ère des « Civil Rights » a augmenté l’auditoire des blues traditionnels, et des festivals tels que le Newport Folk Festival ont programmé des prestations de « grands » comme Son House, Mississippi John Hurt, Skip James, Big Joe Williams ou le Reverend Gary Davis. J.B. Lenoir a enregistré des chansons qui touchaient aux thèmes du racisme ou de la guerre du Viêt Nam.
Des artistes américains comme Bob Dylan, Janis Joplin ou Jimi Hendrix, tous influencés à la fois par le blues traditionnel et le blues électrique, firent découvrir cette musique au jeune public de l’époque. L’interprétation que les artistes de cette génération donnèrent au blues aura plus tard une influence très forte sur le développement de la musique rock proprement dite.
Depuis les années 1980
Pendant les années 1980 et jusqu’à nos jours le blues a continué d’évoluer à travers le travail de Stevie Ray Vaughan, Robert Cray, Bonnie Raitt, Taj Mahal, Ry Cooder, Albert Collins, Keb ‘Mo’, Alvin Youngblood, Corey Harris, Jessie Mae Hemphill, R. L. Burnside, Junior Kimbrough, Kim Wilson, James Harman et ses deux guitaristes Hollywood Fats mann et David « kid » Ramos,Ali Farka Touré et bien d’autres. Le style de blues « Texas rock-Blues » a été créé dans les années 1980, et utilise les guitares solo et d’accompagnement en même temps. Le style Texas a été fortement influencé par le Blues-rock d’Angleterre (comme John Mayall). Les artistes importants du style Texas blues étaient Stevie Ray Vaughan qui révolutionna le style dans les années 1980, The Fabulous Thunderbirds et ZZ Top. À la même époque, John Lee Hooker a retrouvé sa popularité, grâce à ses collaborations avec Carlos Santana (Cd The Healer), Miles Davis, Robert Cray et Bonnie Raitt. Eric Clapton (anciennement desBluesbreakers et du groupe Cream) est redevenu populaire dans les années 1990 avec son album pour MTV Unplugged, où il joue quelques chansons traditionnelles, entre autres succès, sur une guitare acoustique.
Pendant les années 1980 et 1990, des « Blues scenes » furent créés partout aux États-Unis, au Canada, et en Europe. Ces « Blues scenes » comprenaient des revues de Blues (par exemple : Living Blues et Blues Revue), les sociétés de blues, des festivals de blues, et des clubs où est joué du blues.
Caractéristiques
D’un point de vue technique, le blues repose sur trois éléments : un rythme souvent ternaire syncopé, l’harmonie en I-IV-V (c’est-à-dire les degrés principaux dans l’harmonie tonale), et la mélodie qui utilise la gamme blues et les notes bleues. Le blues a eu une influence sur une très large variété de styles musicaux, qui intégrèrent dans des proportions variables l’un ou plusieurs de ces éléments. Si l’on ne peut alors plus parler de blues on utilise fréquemment le qualificatif bluesy pour indiquer cette coloration particulière. Au-delà de stricts canons techniques, le blues se caractérise souvent – mais pas toujours – par une humeur teintée d’une certaine langueur ou mélancolie.
Rythme
Le rythme le plus employé du blues repose sur une division ternaire de chaque noire (ou temps dans une mesure en 4/4) ou triolet de croches. Chaque temps est donc divisé en trois croches dont on ne marque que la première et la troisième. On crée ainsi une impression de décalage quant à l’emplacement « naturel » des notes. Le terme de shuffle est souvent employé pour désigner ce rythme. Le blues est souvent synonyme de tempo medium voire lent.
Harmonie
Initialement assez libre, la structure harmonique du blues se fixe progressivement pour aboutir à une forme de base articulée autour de trois accords, généralement sur 8, 12 ou 16 mesures. La forme en douze mesure est – de loin – la plus commune ; on parle de « 12 bar Blues » (Blues de 12 mesures). Ces trois accords, désignés par les chiffres romains I-IV-V, représentant les premier, quatrième et cinquième degrés (c.-à-d. tonique, sous-dominante et dominante) de la gamme majeurecorrespondant à la tonalité du morceau. ex. : Do/Fa/Sol (« Blues en Do »), Fa/Si bémol/Do (« Blues en Fa »), Mi bémol/La bémol/Si bémol (« Blues en Mi bémol »), etc. Les accords de base comportent le plus souvent la septième (mineure). Dans les formes plus élaborées, les musiciens recourent fréquemment à des accords de neuvième, ainsi qu’à différentes altérations. Dans le jazz, à partir des années 1940 (Bebop), des musiciens comme Charlie Parker ont poussé la sophistication harmonique (et mélodique) de la forme à un degré élevé, qui contraste avec les enchaînements rudimentaires du blues originel (« early blues »). Dans « Blues for Alice », Charlie Parker multiplie les accords de passage et altérations au point que, malgré les 12 mesures caractéristiques, il est parfois difficile pour des oreilles novices de « détecter » la forme (harmonique) du blues.
Suite d’accords de base (Blues en Fa) : | Suite d’accords de « Blues for Alice » : | ||||||||||||||||||||||||
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Mélodie
La mélodie d’une gamme blues traditionnelle est simplement une gamme pentatonique mineure à laquelle on a ajouté une note. C’est cette dernière (la quarte augmentée) qui donne la couleur blues au morceau, d’où son nom de blue note (note bleue). Certains auteurs, notamment Le Roi Jones dans son livre Le Peuple Blues, avancent la théorie que ce serait là une tentative d’adaptation d’une gamme propre à la musique traditionnelle africaine. D’autres relient cela aux musiques amérindiennes, notamment Cherokees, qui proviennent très largement des musiques de l’Asie du Sud Est.
L’autre gamme fréquemment utilisée en Blues est la diatonique majeure. Ce n’est pas la quinte diminuée qui est la note bleue. D’ailleurs il y a deux notes bleues par mode. Ce sont la tierce mineure et la septième mineure. Pour Do : do – ré – mi bémol – fa – sol – la – si bémol. La fonction harmonique reste majeure malgré ces deux intervalles mineurs et c’est ce qui donne la couleur du Blues. Si l’on joue la pentatonique majeure sur la tierce mineure on obtient effectivement ces notes bleues. Toujours pour Do : mi bémol – fa – sol – si bémol- do. La quinte diminuée — en l’occurrence sol bémol — est une note de passage mais n’est pas la note bleue. La plupart des Blues sont en modes majeurs pour l’accompagnement alors que les mélodies sont chantées sur la gamme pentatonique avec la note bleue. Il existe cependant de fameux Blues en mineur par exemple : As the Years Go Passing By par Albert King.
Il faut noter que toutes ces caractéristiques techniques sont loin d’être applicables à l’ensemble des blues joués par les Noirs. Et il faut encore davantage souligner qu’aucun des grands créateurs du blues, lorsqu’on a pu les interviewer, n’a jamais défini le blues comme un ensemble de notations musicologiques. À la question « Qu’est le blues ? », la réponse était le plus souvent du genre : « The blues ain’t nothing but a good man feelin’ bad ».
Instruments
Bien que le blues puisse être interprété sur tout type d’instrument, certains sont traditionnellement plus utilisés que d’autres :
- la guitare : guitare acoustique pour le blues traditionnel ou, à partir des années 1930 la guitare électrique, branchée à unamplificateur qui ajoute des caractéristiques tonales comme la distorsion (à partir des années 1950).
- l’harmonica – diatonique principalement – joué acoustique ou utilisé avec un microphone et un amplificateur.
- Pour la guitare électrique, l’utilisation d’un amplificateur à lampes (ou tubes), est de loin la plus répandue, depuis les premiers amplificateurs, car les lampes apportent une chaleur supplémentaire et un grain au son de la guitare, caractéristique que le transistor n’a point.
- le piano et autres instruments à clavier comme l’orgue Hammond (dès les années 1960 et 1970) ou le piano électrique (à partir des années 1970).
- La batterie, donc le rythme doit être lent et précis.
- la washboard (planche à lessiver), utilisée comme instrument de percussion, frappée par les doigts coiffés de dés à coudre. Utilisée telle que ou agrémentée d’une cymbale, d’un wood-block, d’une cloche, etc. ; parfois remplacée par une tôle finement ondulée portée en plastron.
Timbre
Au sens large, le timbre est la « couleur » du son : même s’ils jouent les mêmes notes, une guitare ou un saxophone se distinguent par leur timbre. Cela est également vrai d’un être humain à l’autre. On a coutume de dire que les chanteurs classiques essaient d’imiter les instruments, alors que les instruments de blues essaient d’imiter la voix humaine (ou parfois celle de Donald Duck, d’un bombardier ou d’une mitraillette).
Les bluesmen ont beaucoup exploré le timbre : ils ont notamment été les premiers, pendant les 1950, à employer des amplificateurs pour la guitare et l’harmonica. Les voix fortes et graves de chanteurs comme Howlin’ Wolf et Muddy Waters jouent également beaucoup sur le timbre. La technologie et les effets de mode ont plus tard ajouté d’autres éléments au son blues, comme les guitares dirty et saturées des Rolling Stones ou d’Eric Clapton ou les effets psychédéliques employés, entre autres, par Jimi Hendrix : le feedback, la distorsion style « Fuzz », et des effets plus étranges encore comme « l’effet leslie ou UniVibe », constitué d’un haut-parleur en rotation.
Vibrato
Le vibrato est un effet appliqué à une note de musique. Très employé notamment par les musiciens de blues, cet effet consiste à provoquer une variation rapide de la hauteur de la note. Comme tous les effets de nuance, le vibrato apporte une expressivité particulière selon la façon dont il est effectué : vite ou lentement, de façon fluide ou saccadée. Le vibrato est un élément essentiel du son blues, que cela soit pour les voix ou sur des instruments tels que la guitare ou l’harmonica. Pour cette dernière, divers moyens ont été utilisés depuis B. B. King, surtout les moyens mécaniques qui modifient légèrement la longueur de la corde vibrante. Plusieurs techniques existent donc, qui donnent chacune des effets sonores légèrement différents : faire vibrer les doigts de la main gauche, ou le manche de la guitare lui-même, ou encore grâce aux différents systèmes de cordier vibrato.
À partir des années 1960, les musiciens de blues-rock utilisèrent également des moyens électroniques, comme la pédale wah-wah ou l’effet Larsen (le « feedback ») finement maîtrisé. Plus récemment, les musiciens de blues ont commencé à utiliser des techniques numériques pour créer du vibrato, comme les boîtiers programmables équipés de processeurs de traitement du signal, qui permettent de paramétrer aussi bien le timbre que l’attaque ou le vibrato. Les instruments principaux sont les instruments à cordes (la basse, la guitare, steel guitare, la contrebasse, le violoncelle, l’alto, le violon) mais également le saxophone, l’harmonica, la batterie, lap steel, le bottleneck et le piano.
Actualité locale, nationale ou mondiale
À l’origine les bluesmen étaient des métayers noirs perdus au fin fond du « delta du Mississippi », plaine cotonnière qui n’est pas le vrai delta mais se situe plus au nord. Ils chantaient souvent pendant des événements locaux tels que la crue du Mississippi (High Waters Blues), la construction des digues (Levee), l’incendie d’une ferme de coton. À la rigueur on parle d’une grande ville pas trop éloignée comme La Nouvelle-Orléans, Memphis, Saint Louis. Mais il y a fatalement des incursions ou des espoirs de voyages dans d’autres villes des États-Unis, que ce soit pour trouver du travail, faire le service militaire ou participer aux luttes d’émancipation.
Un bluesman peut donc être amené à parler de l’actualité nationale. Une anecdote montre le second degré des bluesmen et l’utilisation d’un langage propre. DansSweet home, Chicago, Robert Johnson rêvait d’aller « back to the land of California, to my sweet home, Chicago » ; en 1980, les Blues Brothers corrigeront cette erreur« back to that good old place, sweet home, Chicago » croyant que Johnson avait fait une erreur géographique. En fait la Californie dans l’imaginaire blues signifie pays de richesse, de la ruée vers l’or, ce que représentait Chicago à l’époque pour les bluesmen pauvres du Mississippi. Enfin l’horizon ne manquera pas de s’élargir au globe avec la participation de certains appelés à la Seconde Guerre mondiale, au mur de Berlin, à la guerre du Viêt Nam. On retrouve tout ceci dans des blues comme ceux de J.B. Lenoir. Mais avant tout, le blues est le moyen d’expression musical le plus direct concernant la détresse de l’âme, ainsi, le thème de la dépression (Hard Time Killing Floor Blues, de Skip James), ou bien encore ce thème qui revient souvent dans les standards, celui de la femme quittant son homme. (How long, How long Blues, de Leroy Carr & Scrappy Blackwell).
Un aspect à ne pas négliger est la dimension politique, revendicative, anti-ségrégationniste (dans les années 1960), de certains textes. De nombreux titres sont à double sens: un sens littéral, fréquemment connoté sexuellement, et un deuxième niveau, clairement politique. Ainsi un titre aussi célèbre que I’m a man a deux niveaux : je suis un homme, classique chanson plus ou moins d’amour, et je suis un homme, non pas un demi homme, je veux ma place dans la société, etc. Le thème de la dépression dans les années 1930 ou de la crise depuis des années est naturellement politique.
Cet aspect est bien entendu amoindri lorsque les titres sont chantés par des Britanniques ou des Américains blancs. Notons toutefois que le thème de l’amour, amour bien entendu perdu, est nettement plus fréquent, même si on pourrait se hasarder à faire une métaphore de la femme perdue : femme = dignité, honneur… Enfin les allusions sexuelles, voire salaces, les calembours, sont fréquents : un des exemples typiques pourrait être Dust my broom dont le début est : je me lève le matin et je nettoie (j’épousette) mon balai… la métaphore est claire.
Influence
Musique classique
On peut voir l’influence des blues dans la musique de Maurice Ravel (en particulier dans sa Sonate pour violon et piano), George Gershwin (son Rhapsody in Blue, leConcerto en fa majeur, et Porgy and Bess) dans la musique d’Arthur Honegger (Pacific 231). [réf. nécessaire] ainsi que dans certaines pièces d’Erwin Schulhoff (Cinq pièces de jazz).
Country
Plus qu’une influence du blues sur la musique country, réelle, il faut parler plutôt d’interinfluence tant ces deux genres qui représentent les deux facettes (pauvres blancs, pauvres noirs) du sous-prolétariat sudiste sont à la fois issus des mêmes racines (musique des plantations, des migrants en Amérique) et se sont fécondées l’une l’autre tout au long de leur histoire. Une forme de Hillbilly blues (comme l’a finement baptisé l’auteur anglais Tony Russell) a existé dès les années 1920, véritable premier blues blanc (Jimmie Rodgers, Cliff Carlisle, Gene Autry, Jimmie Davis…). Le blues en tant que tel est resté alors un élément important de toute la Country Music, particulièrement avec le Western Swing puis le Honky Tonk, personnalisé par Hank Williams.
Rock
Le blues est d’abord l’élément principal du « mariage » avec la musique country qui a donné naissance au rock ‘n’ roll, aux États-Unis, au milieu des années 19501. Ensuite, on retrouve facilement des racines blues dans nombre de groupe britanniques de rock et de hard rock : les débuts des Rolling Stones, de Uriah Heep, ou la chanson Smoke On The Water de Deep Purple, doivent beaucoup au blues. Même un groupe progressif comme Pink Floyd (dont le nom lui-même vient de l’association des prénoms des bluesmen Pink Anderson et Floyd Council), a fait appel à plusieurs reprises à la forme blues, non seulement à ses débuts avec Syd Barrett, grand admirateur de Bo Diddley, mais également par la suite, au milieu de morceaux plus psychédéliques (Biding My Time, Seamus, Money, Dogs Of War sont des blues plus ou moins camouflés). Des artistes comme Chris Rea,Snowy White et Gary Moore ou un groupe comme The Doors revendiquent l’influence que le blues a sur leur création.
En fait, il n’est guère de groupes ou d’artistes pop-rock qui, un jour ou l’autre, ne se soit pas inspiré du blues, allant jusqu’à générer une prise de conscience musicale en Angleterre pendant la deuxième partie des années 1960, avec le British blues boom, représenté notamment par Alexis Korner puis par John Mayall, Eric Clapton,Cream, Fleetwood Mac, Chicken Shack, Savoy Brown et Rory Gallagher (Irlande). Aux États-Unis, plusieurs artistes blancs ont également bâti l’essentiel de leur œuvre sur le blues, tels The Allman Brothers Band, Mike Bloomfield, le Blues Project, Paul Butterfield, Roy Buchanan, Canned Heat, The Doors, Jeff Healey (Canada), John Hammond, Janis Joplin, Charlie Musselwhite ou encore Johnny Winter.
En France
En France, des artistes comme Alain Giroux, Benoit Blue Boy, Patrick Verbeke, Bill Deraime, ou Paul Personne incarnent une vision francophone du blues, mais très influencée par la musique américaine. Côté instrumental, l’harmoniciste Jean-Jacques Milteau est un musicien de session et un performer internationalement apprécié depuis les années 1970, ayant enregistré plusieurs albums qui font référence. Plus récemment, d’autres harmonicistes, Nico Wayne Toussaint, Vincent Bucher et Greg Zlap ne sont pas en reste et tournent inlassablement dans les meilleurs festivals.
Depuis les années 1980 de nombreuses individualités ou formations continuent de faire vivre le blues hexagonal, comme en témoigne régulièrement les revues Soul Bag, Blues Magazine, Blues & Co et BCR La Revue (toutes trimestrielles). En parallèle, l’augmentation très significative des émissions de radios spécialisées a contribué à offrir une nouvelle vitrine au blues hexagonal. Le Collectif des radios blues (CRB), créé en 2003, réunit de nombreux animateurs en France, Belgique, Québec. Il réalise chaque mois le PowerBlues, classement des meilleurs sorties CD blues et l’Airplay, regroupement des albums les plus diffusés par les radios. Enfin le Collectif délivre chaque année son label « Sélection du CRBl » à quelques-unes des meilleures sorties CD.
Le Tremplin Blues sur Seine, créé en 2000, a révélé la plupart des nouveaux artistes français de ce style musical (Roland Tchakounté, Charles Pasi, Nina Attal, Stringers in the night, Shake Your Hips!, Olivier Gotti, etc) En janvier 2011, plusieurs membres de la communauté blues française ont créé l’association France Blues. Elle vise à promouvoir le blues français et leurs acteurs, notamment à l’échelle internationale. La chanteuse Nina Van Horn, qui raconte depuis quelques années les histoires des femmes du Blues sur W3 Blues Radio, a été à l’origine d’une trilogie sur ces femmes qui contribuèrent si fort au blues tout en traitant de sujets d’actualité (drogue, sexe, prohibition, ségrégation et droits des femmes). Elle leur a d’abord rendu hommage sur CD, puis a écrit un livre Hell of a Woman (Société des écrivains) décrivant leurs incroyables vies ; elle vient de sortir un double album (CD/DVD) d’une de ses tournées en Inde. Elle voyage inlassablement depuis 2011 pour contribuer à faire connaître « ses » pionnières du blues dans plus de 18 pays.
Dans le cinéma
Le blues a également influencé le cinéma, surtout aux États-Unis. Le film Crossroads (Walter Hill) (1986) montre le mythe sulfureux du pacte avec le diable. Bande son de Ry Cooder et duel mythique entre le héros du film Ralph Macchio et Steve Vai en personne. Le pacte de Tommy Johnson (plus tard repris et rendu célèbre parRobert Johnson) est évoqué dans le film O’Brother, de Joel Coen. Les deux films de John Landis, The Blues Brothers (1980) et Blues Brothers 2000 (1998), qui dressent un panorama de différents styles et mettant en scène une pléthore de vedettes, ont eu une importante influence sur l’image du blues.
En 2003, déclarée « année du blues » aux États-Unis, Martin Scorsese produit une série de sept films documentaires sur le blues intitulée The Blues, a Musical Journey2 :
- The Soul of a Man, de Wim Wenders, à propos de Skip James, Blind Willie Johnson et J.B. Lenoir,
- La Route de Memphis (The Road to Memphis), de Richard Pearce, qui traite plus particulièrement de B. B. King (titre français La Route de Memphis),
- Du Mali au Mississippi (Feel Like Going Home), de Martin Scorsese, sur les origines africaines du blues (titre français Du Mali au Mississippi),
- Devil’s Fire (Warming by the Devil’s Fire), de Charles Burnett, une fiction sur le conflit du blues et du gospel,
- Red, White and Blues, de Mike Figgis, sur le blues britannique (Tom Jones, Van Morrison),
- Godfathers and Sons, de Marc Levin, sur le Chicago Blues et le hip hop,
- Piano Blues, de Clint Eastwood, sur les pianistes de blues (Ray Charles, Dr. John).
Le film 24 Mesures3, de Jalil Lespert, avec Archie Shepp, est librement inspiré des mélodies du blues et du free jazz.
Principaux artistes
- Musiciens : Voir la catégorie musicien de blues et la Liste de musiciens de blues par style.
- Chanteuses : Voir la catégorie chanteuse de blues.
- Chanteurs : Voir la catégorie chanteur de blues.
Bibliographie
- David Ausseil, Charles-Henry Contamine, Denis Chapoullie, La Route du blues, éd. Barthélémy, 1995
- Patrick Bard et Patrick Raynal, Blues Mississippi Mud, éd. La Martinière, 1993
- Philippe Bas-Raberin, Les Incontournables du blues, éd. Filipacchi, 1994
- Philippe Bas-Raberin, Le Blues moderne, 1945-79, éd. Albin Michel, 1979-86
- Big Bill Broonzy et Yannick Bruynoghe, Big Bill blues, éd. Ludd, 1987
- Larry Cohn, Nothing but the blues, éd. Abbeville, 1993 (traduction)
- Sebastian Danchin, B.B. King, éd.Limon, 1993
- Jacques Demètre et Marcel Chauvard, Voyage au pays du blues, éd. CLARB, 1995
- Gérard Herzhaft, John Lee Hooker, éd. Limon, 1991
- David et Gérard Herzhaft, Le Livre de l’harmonica, éd. Fayard, 2008
- Gérard Herzhaft, La Grande encyclopédie du blues, éd. Fayard, 1997-2008
- Gérard Herzhaft, Le Blues, éd. PUF, coll. Que sais-je ?, 1981-2008
- Gérard Herzhaft, La Country music, éd. PUF., coll. Que sais-je ?, 1985-2009
- Francis Hofstein, Le Rhythm & blues, éd. PUF, coll. Que sais-je ? no 2619, 1991
- Francis Hofstein, Muddy Waters, éd. Actes-Sud, 1996
- Stéphane Kœchlin, Le Blues, fleur africaine? éd. Hachette, coll. Qui, quand, quoi?, 1996
- Jean-paul Levet, Talking That Talk : Le langage du blues, du jazz et du rap, Soul Bag/CLARB, 1986-Hatier, 1992-Kargo, 2003-Outre Mesure, 2010
- Jean-Paul Levet, Rire pour ne pas pleurer : le Noir dans l’Amérique blanche / Laughin’ Just to Keep from Cryin’: Blacks in White America, éd. Parenthèses, 2002
- Robert Sacré, Les Negro spirituals et les gospel songs, éd. PUF, coll. Que sais-je ? no 2791, 1993
- Robert Sacré, Musiques cajun, créole et zydeco, éd. PUF, coll., Que sais-je ? no 3010, 1995
- Robert Springer, Les Fonctions sociales du blues, éd. Parenthèses, 1999
- André Vasset, La Vie et l’œuvre de Big Bill Broonzy, chez l’auteur, 1996
Films
- You See Me Laughin, documentaire sur les bluesmen Junior Kimbrough, RL Burnside, etc.
- Celebration of Blues, réalisé par Antoine Fuqua et produit par Martin Scorsese. Filmé au Radio City Music Hall à New York le 7 février 2003.
- Black Snake Moan (2006) réalisé par Craig Brewer. Avec Samuel L. Jackson, Christina Ricci et Justin Timberlake
- Cadillac Records réalisé par Darnell Martin, sorti en 2008, avec Beyoncé Knowles, Mos Def, Cedric the Entertainer et Adrien Brody.
- Crossroads, 1986
Notes et références
- Cf Muddy Waters dans The Blues Had A Baby And They Named It Rock And Roll, sur son album Hard Again (1977)
- The Blues, A Musical Journey, la fiche dans Allociné [archive]
- 24 Mesures [archive], fiche sur Allociné
Voir aussi
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